Quʼattendre des biens de seconde main ?

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Comment pouvons-nous être sûrs que la bouilloire dʼoccasion que nous venons dʼacheter ne va pas nous exploser en pleine figure ? Sachant que lʼachat de produits usagés peut apporter son lot de mauvaises surprises, lʼISO/TS 20245 est là pour nous éviter de nous faire escroquer.
Quand vous achetez une machine à laver dʼoccasion, vous êtes prêt à accepter quelques raies ou égratignures, mais certainement pas quʼelle provoque une inondation ou quʼelle tombe en panne au premier essorage. Nous attendons des produits que nous achetons – neufs ou dʼoccasion – quʼils soient aptes à lʼemploi, sûrs, exempts de défaut et que leur durée de fonctionnement soit raisonnable.

Nécessité ou logique anticonsumériste, le commerce de marchandises usagées a augmenté de manière exponentielle au cours des dernières décennies, en particulier dans les pays en développement ou à économie en transition. Faut-il pour autant sacrifier la qualité au prix ? Comme tout produit acheté neuf, les produits de seconde main devraient répondre aux attentes dʼun consommateur raisonnable, conscient quʼil sʼagit dʼun bien dʼoccasion. Pour être acceptables, ils doivent remplir certains critères, notamment en termes de qualité, dʼinformation sur le produit et de conditions dʼutilisation, et fournir des indications supplémentaires sur leur état.

Partant du principe que les produits dʼoccasion ne doivent pas présenter plus de risques pour la santé, la sécurité ou lʼenvironnement que des produits neufs, le comité de projet ISO/PC 245 a publié une spécification technique, ISO/TS 20245, qui établit des critères de sélection minimum dans ce domaine. Le document aide à réguler ce marché informel et évite lʼenvoi à la décharge de milliers de tonnes de matériels dont les propriétaires ne veulent plus.

Publiée en 2014, ISO/TS 20245, Commerce frontalier des produits de seconde main, est la première spécification technique mondiale qui traite des biens usagés troqués, vendus, donnés ou échangés entre les pays. Elle précise comment évaluer et classer les produits selon leur état : A (très bon état), B (bon état), C (assez bon état), D (mauvais état). Ces critères mesurables sont très utiles aux importateurs, exportateurs ou aux gouvernements, pour contrôler au point dʼentrée sur le territoire, les biens de seconde main en transit. Ils garantissent ainsi la protection des consommateurs et de lʼenvironnement.

Rae Dulmage, Président de lʼISO/PC 245, Commerce frontalier des produits de seconde main, nous explique ici pourquoi nous pouvons acheter dʼoccasion en toute confiance.

ISOfocus : Avec lʼessor du marché de lʼoccasion, quelles sont les mesures à prendre pour assurer la protection des consommateurs ?

 

Rae Dulmage
Rae Dulmage, Président de lʼISO/PC 245, Commerce frontalier des biens de seconde main.

Rae Dulmage : Quand on se regarde dans un miroir, on ne se voit pas vieillir. Il en va de même pour les produits que lʼon utilise. Après des années de bons et loyaux services, il se peut que votre tondeuse à gazon ne démarre plus quʼaprès cinq tentatives infructueuses, que votre costume commence à se lustrer et que votre ordinateur soit plus lent. Cʼest pourtant ce type de produits qui se vendent dans les magasins dʼoccasion ou sur les sites de commerce en ligne comme Amazon ou eBay. Ces articles peuvent être défraîchis, non conformes aux normes ou carrément dangereux. Mais nous les achetons et lʼidée de faire une « très bonne affaire » nous fait parfois passer à côté de quelques signaux dʼalerte.

Les consommateurs et les revendeurs doivent avoir un regard critique sur lʼhistorique, la durée dʼutilisation et lʼétat du produit quʼils sʼapprêtent à acheter. Avant de passer à la caisse, nous devons inspecter soigneusement lʼobjet et chercher les traces dʼusure, dʼutilisation impropre et de réparation. Nous devrions également exiger le mode dʼemploi et le carnet dʼentretien, et nous renseigner sur les éventuels retraits. Qui plus est, certaines marchandises, surtout celles qui ont trait à la sécurité primaire ou à la protection de la sécurité des personnes, ne devraient tout simplement pas être réutilisées.

Quelques questions judicieuses vous aideront à décider sʼil vaut la peine dʼacheter tel ou tel produit. À quoi va-t-il me servir ? Combien de temps vais-je lʼutiliser ? Ne prenez pas ce que lʼon vous dit pour argent comptant, vérifiez tout par vous-même. Plus important encore, achetez chez un revendeur de bonne réputation, qui sait ce quʼil vend. Et appliquez les principes dʼISO/TS 20245.

Comment les Normes internationales protégeront-elles les consommateurs face à des marchandises peu sûres et dangereuses ?

Avec le marché de lʼoccasion, certains articles comme les téléviseurs, les réfrigérateurs, les ordinateurs et les téléphones portables sont devenus abordables pour des personnes qui nʼauraient pu se les offrir neufs. Cette catégorie de consommateurs a besoin dʼêtre protégée contre des biens dʼoccasion peu fiables, voire dangereux.

Dans ce contexte, les Normes internationales sʼapparentent à des bouées ou des balises qui nous aident à naviguer dans cet afflux de produits potentiellement dangereux ou en mauvais état. Elles établissent un ensemble de critères mesurables, fondés sur le consensus international, permettant dʼévaluer les biens dʼoccasion pour protéger les consommateurs contre les risques pour la santé et la sécurité liés à ce type dʼachat. Si elles sont adoptées dans différents pays et organisations, elles peuvent aider les consommateurs à séparer le bon grain de lʼivraie et à débarrasser le marché de produits inacceptables pour y instaurer confiance et cohérence.

 

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En quoi le travail de lʼISO/PC 245 augmentera-t-il la confiance des consommateurs ?

Il y a, à lʼheure actuelle, sur le marché quelques associations et organisations sérieuses qui appliquent de bonnes pratiques dans le traitement des biens dʼoccasion. Ce nʼest malheureusement pas le cas partout, et cʼest souvent une approche régionale. En fin de compte, le travail de lʼISO/PC 245 est de fournir les moyens de rendre ces bonnes pratiques universellement applicables et disponibles. Quand elles seront appliquées partout, les consommateurs pourront avoir confiance. Voilà pourquoi il est si important que toutes les parties adhèrent aux travaux du comité.

Afin dʼévaluer lʼaccueil réservé à lʼISO/TS 20245, lʼISO a lancé une enquête en ligne pour obtenir les avis des utilisateurs quant aux points de vue et priorités à inclure dans les futures éditions du document.

Comment les résultats de cette enquête sur lʼISO/TS 20245 seront-ils pris en compte dans lʼélaboration de la future norme ?

Nous nʼavons pas obtenu beaucoup de retour, mais le peu que nous avons reçu a bien mis en évidence la nécessité de prendre en compte le recours aux codes de produit internationaux ainsi que la Convention de Bâle, qui préconise une réduction des mouvements transfrontières des déchets dangereux. Après de longues discussions, nous avons conclu que le domaine dʼapplication dʼISO/TS 20245 ne devrait pas se limiter aux produits de consommation, mais inclure dʼautres types de marchandises.

Nous avons également reçu des commentaires de certains membres du Protocole dʼaccord ISO/IEC/UIT/CEE-ONU sur le commerce électronique, qui nous ont été utiles. Ce forum, dont la vocation est la facilitation du commerce mondial dans le domaine du commerce électronique et lʼencouragement des synergies en matière de normalisation, a relevé plusieurs domaines de divergence et de chevauchement à traiter à lʼavenir.

Il a aussi été signalé quʼune liste de vérification type serait utile. Étant donné lʼévolution vers une économie circulaire – un autre modèle économique dans lequel les produits sont conçus pour être reconfigurés ou ré-exploités à dʼautres fins et les équipements loués pour être recyclés dans le marché – la norme doit tenir compte de lʼensemble du cycle de vie. Jusquʼici, ce sont les utilisateurs dʼISO/TS 20245 qui décident quels produits doivent répondre aux exigences du référentiel.

 

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Sachant que, dans le monde, des millions de personnes achètent des biens dʼoccasion ou usagés, comment la future norme permettra-t-elle dʼaugmenter les contrôles et la surveillance ?

Si lʼon parvient à conjuguer dans une même approche « cycle de vie » cohérente toutes les exigences relatives aux biens dʼoccasion, aux déchets, aux produits à peine utilisés et au développement durable, on peut envisager deux situations. Dans la première, avec la prise de conscience que les produits dangereux doivent être traités de manière sûre de bout en bout, il ne sera plus question de se débarrasser des objets sur le trottoir, de les expédier loin par bateau ou de les abandonner dans un centre de recyclage. Dans la deuxième, plus positive, un meilleur flux de traitement des biens usagés, permettra dʼobtenir, espérons-le, une contribution supérieure au développement durable.

Le comité espère que le niveau dʼadoption de la nouvelle norme sera plus élevé. Si les pays appliquent les exigences de lʼISO/TS 20245 dans le cadre de leurs règlements dʼimportation, que les organisations les intègrent dans leurs pratiques dʼachat et de transformation, et que les organismes de bienfaisance les appliquent systématiquement dans leurs activités, les produits dangereux et peu fiables seront progressivement retirés du marché et mis au rebut de façon appropriée. En ce qui concerne les consommateurs, ils obtiendront des biens dʼoccasion sûrs et réparables, pour un rapport qualité/prix intéressant.

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Elizabeth Gasiorowski-Denis

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