Passer à la vitesse supérieure d’ici 2030
Avec les normes, nous œuvrons à la réalisation des Objectifs mondiaux de l’ONU.
Le Programme de développement durable à l’horizon 2030 a été lancé en 2015 pour éliminer la pauvreté et mettre le monde sur la voie de la paix, de la prospérité et de l’égalité des chances pour tous. Riches d’une longue histoire qui remonte à 1947, l’ISO et l’ONU sont unies par l’objectif commun de faire de ce programme une réalité. La Directrice générale de l’Office des Nations Unies à Genève (ONUG), Tatiana Valovaya, concentre ses efforts sur cette collaboration et sur la manière d’intégrer au mieux les Normes internationales dans le processus de réalisation des Objectifs de développement durable des Nations Unies d’ici 2030.
Pour réaliser les 17 Objectifs de développement durable (ODD) qui sont au cœur du Programme de développement durable des Nations Unies à l’horizon 2030, les parties prenantes doivent impérativement faire preuve d’une volonté politique inébranlable et engager une action ambitieuse. Il faut transformer les systèmes financiers, économiques et politiques qui régissent aujourd’hui nos sociétés afin d’assurer un avenir durable pour tous. Toutefois, le Sommet sur les ODD qui s’est tenu en septembre 2020 et le rapport qui en est issu ont souligné l’insuffisance des efforts déployés jusqu’ici à l’échelle mondiale. Les progrès enregistrés restent inégaux, et les changements ne s’effectuent pas toujours au rythme requis. En d’autres termes, nous ne sommes pas en bonne voie pour atteindre les ODD d’ici 2030, ce qui remet en cause la promesse que représente le Programme 2030 pour les générations actuelles et futures.
Plus de 1,6 milliard d’enfants sont déscolarisés, et des dizaines de millions de personnes souffrent de l’extrême pauvreté et de la faim. À présent, la COVID-19, qui provoque une crise sanitaire, économique et sociale sans précédent, menace la vie et les moyens de subsistance d’un bien plus grand nombre de personnes, ce qui rend la réalisation des ODD encore plus difficile, et la nécessité d’une collaboration internationale encore plus urgente.
Encourager les partenariats
Alors que nous subissons les assauts de la COVID-19, les grandes perturbations qui affectent le monde contemporain en constante évolution modifient notre façon de penser, de nous comporter ou de faire des affaires. Pour faire face à ces perturbations, il faut impérativement une stratégie mondiale claire, qui permette d’anticiper et de s’adapter rapidement aux nombreux changements. Selon Tatiana Valovaya, « la pandémie mondiale, le changement climatique, les inégalités économiques et sociales et les inégalités entre les sexes sont autant de défis mondiaux pour lesquels nous devons absolument trouver des solutions multilatérales applicables à l’échelle mondiale ».
Cette conception du multilatéralisme a donné lieu à un besoin accru de Normes internationales. Quel est le rôle de ces normes dans cette transformation d’ampleur mondiale ? Tout simplement, elles procurent des outils prêts à l’emploi pour mener à bien cette transition. Regrouper différents acteurs clés sous l’égide de l’ISO fait partie intégrante d’une approche multilatérale qui se révèle absolument indispensable pour respecter les objectifs du Programme 2030. Mme Valovaya est elle-même une fervente avocate du multilatéralisme. D’après elle, en cette période agitée et intense, les ODD des Nations Unies nécessitent plus que jamais des partenariats, car la situation exige d’affronter des défis mondiaux complexes en prenant en compte de nombreuses dimensions différentes. Au sujet de l’appel à accélérer les progrès réalisés, elle souligne la nécessité d’une collaboration plus étroite. « La pandémie nous a montré que nous sommes tous dans le même bateau. Il nous faut absolument trouver des solutions mondiales. Les solutions nationales à elles seules ne suffiront pas. »
Ce que la Directrice générale de l’ONUG préconise plus exactement, c’est un multilatéralisme d’un genre nouveau. S’appuyant sur une collaboration étroite qui s’étend sur plusieurs décennies, l’ISO et l’ONU ont renforcé leurs relations au fil des ans, et plus récemment sous la nécessité d’optimiser les résultats des ODD. De concert, les deux organisations s’emploient à accélérer les progrès accomplis en matière de réalisation des ODD, notamment en favorisant les innovations évolutives et les possibilités de partenariats.
Stratégies communes
La pandémie a mis en lumière les solutions de portée internationale. Elle nous a montré de manière très concrète à quel point nous sommes interdépendants. Selon Mme Valovaya, l’isolement n’est pas la solution. Comme elle l’explique, « il nous faut impérativement trouver des solutions mondiales car, si les solutions nationales peuvent donner de bons résultats pendant un certain temps, ce n’est pas le cas à long terme. Ce que la pandémie révèle en fait, c’est qu’une stratégie commune s’avère nécessaire pour décider des mesures appropriées et de la manière de les coordonner afin de les rendre plus efficaces. »
La pandémie a mis en lumière les solutions de portée internationale.
Mme Valovaya donne l’exemple suivant : si le lavage ou la désinfection des mains est l’un des moyens les plus efficaces de ralentir la transmission virale, 4,2 milliards de personnes, soit plus de la moitié de la population mondiale, n’ont toujours pas accès à de l’eau propre. Ce problème majeur compromet l’exercice du droit humain fondamental à l’eau potable et à l’assainissement pour des milliards de personnes. La Directrice générale de l’ONUG explique comment la pandémie a servi de « coup de semonce » efficace pour l’humanité en favorisant des pratiques durables à long terme. Comme nous ne pouvons produire plus, la seule solution consiste à être plus efficient avec ce que nous avons.
L’amélioration de l’efficience a été l’un des dogmes de l’ISO. La question de l’eau (et de son utilisation efficiente) a constitué un thème majeur, qui regroupe à ce jour plus d’un millier de normes. Publiée récemment, l’ISO 46001, Systèmes de management de l’utilisation efficiente de l’eau – Exigences et recommandations d’utilisation, vise à aider les organismes de toutes tailles et de tous types à être plus efficients en matière d’utilisation de l’eau et fournit des méthodes et outils permettant d’évaluer et de prendre en compte l’utilisation de l’eau ainsi que des moyens de déterminer et de mettre en œuvre des mesures destinées à optimiser cette utilisation. L’ensemble de ces normes contribue directement à la réalisation de l’ODD 6, qui vise à garantir l’accès de tous à des services d’alimentation en eau et d’assainissement gérés de façon durable.
Un monde globalisé, confronté à des défis de nature intrinsèquement mondiale, nécessite une action concertée à l’échelle du globe.
Lutter contre le changement climatique
Comme l’explique Mme Valovaya, les enjeux mondiaux d’aujourd’hui imposent une accélération du processus décisionnel ainsi que la recherche d’un consensus entre nos sociétés. L’une des tâches essentielles de l’ISO consiste à harmoniser les différentes approches afin d’en dégager une perspective cohérente qui permette de relever un bon nombre des défis mondiaux qui se posent actuellement. Prenant l’exemple du changement climatique, elle nous rappelle que « les normes sont un élément central de la lutte contre le changement climatique ; il existe en effet toute une série de normes destinées à aider des secteurs d’activité particuliers à réduire leur impact sur le climat ». L’ISO a élaboré plus de neuf cents normes relatives à l’environnement qui contribuent directement à la réalisation de l’ODD 13 sur l’action climatique. Elle continue aussi de participer activement aux sommets de la Conférence des Parties (COP) à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, où ses experts soulignent l’importance des normes pour l’ouverture des marchés mondiaux aux énergies propres et aux technologies à haut rendement énergétique et le soutien des pratiques d’adaptation au changement climatique et d’atténuation des effets de ce changement.
Les normes environnementales aident aussi les gouvernements et les organismes à faire face au changement climatique. Cette série de normes est considérée comme essentielle aux marchés des gaz à effet de serre (GES) pour ce qui concerne la neutralité carbone, les programmes de plafonnement des émissions et d’échange de droits d’émission, les crédits compensatoires et les stratégies et politiques à faible émission de carbone. Comme l’explique la Directrice générale de l’ONUG, les normes nous donnent un excellent moyen de mettre en œuvre nos stratégies en matière d’action climatique. « Ainsi, même si nous avons, je le pense, une feuille de route adéquate [pour 2030], les normes ISO fournissent les indicateurs que nous devons prendre en compte pour atteindre nos objectifs. »
Combler l’écart entre les sexes
Le changement climatique a plus d’impact sur les catégories de la population qui dépendent des ressources naturelles pour leur subsistance et qui sont moins en mesure de réagir aux aléas naturels tels que les ouragans, les inondations ou les sécheresses. Dans les situations de pauvreté, les femmes sont généralement exposées à de plus grands risques liés aux effets de l’évolution du climat, sachant qu’elles représentent toujours la majorité des pauvres dans le monde. En outre, la sous-représentation des femmes dans les processus décisionnels et sur le marché du travail les empêche de contribuer pleinement à la lutte contre le changement climatique.
L’autonomisation des hommes et des femmes est un objectif essentiel de l’ODD 5 sur l’égalité des sexes. En tant qu’avocate internationale de la cause de l’égalité des sexes et première femme à occuper le poste de Directeur général de l’ONUG, Mme Valovaya est persuadée que la prise en compte des responsabilités en la matière entraînera une transformation vers un monde plus égalitaire. Elle fait observer que si les efforts déployés à l’échelle du globe pour réaliser l’ODD 5 ont beaucoup progressé ces dernières années, des obstacles subsistent. Selon elle, il faut instaurer une véritable égalité des chances pour les femmes et les hommes et disposer à cet effet de normes qui tiennent compte de ce paramètre.
Avec de nombreuses organisations, l’ISO a signé en 2019 la Déclaration sur les normes et l’élaboration des normes tenant compte des questions de genre au siège de la Commission économique des Nations Unies pour l’Europe. Ce faisant, elle s’est officiellement engagée à tenir compte de la problématique hommes-femmes lors de l’élaboration et de la mise en œuvre des Normes internationales aux fins de réalisation des objectifs d’inclusion et de diversité. L’objectif est de soutenir des processus d’élaboration des normes plus inclusifs et assurant un meilleur équilibre entre les sexes et de renforcer la prise en compte de la problématique hommes-femmes dans les normes elles-mêmes, notamment en procédant à une analyse axée sur cette question pour l’élaboration ou la révision de toutes les normes.
Partage des responsabilités
Au niveau mondial, la principale difficulté est cependant moins de savoir pourquoi nous devrions coopérer que comment nous devrions le faire. Le multilatéralisme inclusif repose sur une interaction active des États membres et de leurs gouvernements, de la société civile, des entreprises, des autorités locales et régionales et des nombreuses autres parties prenantes – mobilisant l’ensemble de la trame politique, économique et sociale de nos sociétés. Il ne fait guère de doute qu’une coordination internationale d’une telle ampleur peut exercer une influence positive sur le développement humain et la condition humaine.
De nos jours, nous sommes collectivement confrontés à des défis mondiaux interdépendants qui exigent une approche multipartite à l’appui d’un développement durable. La crise de la COVID-19, par exemple, a révélé les principales vulnérabilités de l’actuel mode de production hypermondialisé ainsi que les importantes lacunes de l’architecture de la gouvernance mondiale. Un monde globalisé, confronté à des défis de nature intrinsèquement mondiale, nécessite une action concertée à l’échelle du globe.
Selon Tatiana Valovaya, l’ISO et l’ONU partagent un objectif et un programme communs, qui se complètent bien. Vu qu’il existe un ensemble de Normes internationales pour pratiquement chaque objectif du Programme 2030, Mme Valovaya incite les entreprises, les organismes et la société civile du monde entier à utiliser les normes ISO comme des moyens concrets de réaliser les 17 ODD, notamment en matière de changement climatique et d’égalité des sexes. Les normes sont judicieusement appliquées dans tous les domaines qui contribuent au développement socio-économique de la société. « Quels que soient les objectifs, précise-t-elle, il existe des normes de la plus grande importance qui nous aident à les réaliser. » À une décennie de l’échéance, nous ne pouvons guère nous permettre de ne pas les utiliser.